Frais émoulu de la Cornell University, Gilles Beaudet s’installe en 1968 comme professeur au Département de physique. À Cornell, il avait fait sa thèse sous la direction d’Ed Salpeter, tout comme Hubert Reeves quelques années plus tôt.
Gilles a publié une vingtaine d’articles sur l’évolution des étoiles et le Big Bang. Dans sa thèse, il s’était intéressé à une des dernières étapes de la vie des étoiles, les étoiles au carbone. Son article sur leur perte d’énergie par l’émission de neutrinos (Beaudet et al. 1967) est toujours abondamment cité. Au cours de sa carrière, il a aussi créé le cours de troisième cycle sur l’évolution des étoiles au Département de physique. Lors de sa première année sabbatique (1974-75) à l’université de Tel-Aviv, il a développé un modèle pour la nucléosynthèse durant le Big Bang. Il a publié une demi-douzaine d’articles sur ce sujet avec différents collaborateurs.
Pendant ce temps, il s’implique activement dans les efforts du Département pour le développement de l’astronomie d’observation. Tout théoricien qu’il fut, Gilles Beaudet voulait voir l’émergence au Québec d’un groupe d’astronomes. Ce fut d’abord un projet de radio astronomie quand une ancienne base de radar à Parent (qui fait maintenant partie de La Tuque) fut fermée et à laquelle le Ministère fédéral de l’Expansion économique régionale voulait trouver une nouvelle fonction : il suggérait d’y installer un radio télescope. Gilles a activement poursuivi le projet mais il est apparu assez rapidement que trop peu de financement était disponible et qu’un projet de télescope optique offrait plus de possibilités. Tenant compte de l’intérêt d’un astronome de l’Université de Toronto, René Racine, pour ce dernier projet, l’Université l’appuya et Gilles se mit à l’œuvre, par exemple, en passant des nuits à parcourir le Québec pour documenter où étaient les sites avec un ciel suffisamment noir pour l’accueillir. Ses efforts furent couronnés de succès, le projet fut financé par les conseils subventionnaires, et René Racine en prit la direction. L’astronomie d’observation se développait au Québec.
Gilles Beaudet avait aussi un autre projet international : la venue à Montréal en 1979 de l’Assemblée générale trisannuelle de l’Union Astronomique Internationale; c’était la première fois qu’elle se tenait au Canada et y a réuni quelque deux mille participants pendant deux semaines. Gilles a assumé la direction de l’organisation locale et a fait de cet évènement un franc succès, qui a contribué à mettre Montréal sur la carte de l’astronomie
En 1982, Gilles a accepté la direction du Département de physique avec le but de le développer dans l’excellence. Il a choisi de favoriser une expansion basée sur l’accueil de chercheurs boursiers, en particulier ceux du CRSNG; il savait reconnaitre les qualités des jeunes chercheurs et comment les aider à débuter une carrière fructueuse. Il soutenait également cette expansion en appuyant énergiquement les projets des différents groupes de recherche.
On se souvient des fêtes qu’il organisait chez lui où la musique et la danse témoignaient de ses origines rurales: Gilles Beaudet à l’accordéon, Gilles Fontaine à l’harmonica ou la guitare et son épouse Margo au piano. Il créait une atmosphère exceptionnelle au Département.
En 1987, le nouveau doyen de la FAS, Robert Lacroix invite Gilles à se joindre à son équipe, reconnaissant ainsi les succès que Gilles avait à la direction du Département de physique. Gilles accepte un poste de vice-doyen avec mandat de favoriser le développement des différents départements de la FAS en appliquant l’approche qu’il avait utilisée en physique : embaucher de jeunes et prometteurs professeurs chercheurs. Il y incita avec habileté les Directeurs des différents départements de la FAS et contribua ainsi à l’essor de l’ensemble de la FAS pendant le décanat de Robert Lacroix.
Gilles est décédé le 6 avril 2020 à la suite d’une longue maladie. Sa nièce, Nadine Beaudet, en a fait un récit émouvant dans un film « Le chant de étoiles » (disponible en ligne à F3M.ca) qui évoque de façon poétique la beauté de la musique et de l’Univers.
Georges Michaud